Contexte du projet
L’île d’Yeu présente une structure géo-morphologique très différente du reste des côtes vendéennes, marquée par une importante dissymétrie. Au sud-ouest, face à l’Atlantique, la façade littorale est composée de hautes falaises de gneiss, ponctuées par quelques petites plages isolées. Zone naturelle protégée, cette portion de l’île est très peu construite. A contrario, la façade nord-est, face au continent, est relativement basse au-dessus du niveau de la mer, et composée d’une succession de plages, séparées par des pointes rocheuses. La majorité des habitations, ainsi que le port, sont situés sur cette façade, qui concentre donc à la fois les enjeux et les risques côtiers principaux.
Avec le changement climatique et la remontée du niveau marin, les risques d’érosion et de submersion augmentent significativement, et les études scientifiques sur le fonctionnement des environnements autour de l’île font défaut. Il est donc urgent de mieux connaître ces environnements et les phénomènes responsables des mouvements du sable (dynamique sédimentaire) autour de l’île d’Yeu, pour mieux anticiper l’érosion côtière et les risques associés.
Objectifs
Pour pallier le manque de données actuelles, le projet de recherche ODySéYeu a pour ambition de réaliser un bilan sédimentaire et de mettre en place des outils participatifs pour assurer la veille environnementale de demain.
Engagé dans la surveillance de l’érosion côtière au sein de l’OSUNA (Observatoire des Sciences de l’Univers Nantes Atlantique), aux côtés de l’OR2C (Observatoire Régional des Risques Côtiers), le projet ODySéYeu est un programme de co-construction de connaissances, piloté par Nantes Université ( laboratoire LETG, UMR 6554).
Collaboratif, ce projet regroupe un ensemble de partenaires associatifs, privés, institutionnels et universitaires, qui travaillent ensemble pour apporter des réponses concrètes aux questions qui se posent localement, pour comprendre et gérer durablement l’érosion côtière. Unique par sa dimension collaborative, le projet met en place sur l’île des méthodologies de travail qui seront applicables par la suite à de nombreux territoires.
Le projet se donne pour objectif d’identifier, à terre et en mer, les stocks de sable qui jalonnent les côtes de l’île, et de comprendre comment se réalisent les transferts de sable entre ces stocks. Pour ce faire, trois grand axes sont développés:
- la reconstitution de l’histoire de ces stocks – et donc celle de l’île-, afin de mettre en perspective les phénomènes actuels dans les tendances de long terme, en remontant dans le temps jusqu’à plus de 10 000 ans.
- La mise en place d’outils de surveillance collaboratifs, permettant aux habitants de l’île d’être autonomes dans la surveillance de l’érosion de leur île.
- La création de méthodologies de co-constructions de connaissances, permettant à l’ensemble des acteurs du littoral, y compris la population insulaire, de participer à l’élaboration d’un corpus de connaissances partagées et communes.
A moyen terme, le projet ambitionne la mise en place d’un observatoire local, pilote pour les îles qui portera trois pôles fonctionnant en synergie permanente : un pôle observations et recherche, un pôle conseil en gestion littorale insulaire et un pôle valorisation des connaissances.
Recherche collaborative
Science participative, recherche action, sciences citoyennes, il existe aujourd’hui un ensemble de termes qui ont chacun leurs subtilités et parmi lesquels il est difficile de se repérer.
ODySéYeu est un projet de Recherche Collaborative, ce qui suppose la co-construction d’un objet de connaissance entre chercheurs et acteurs d’usage.
Concrètement, cela signifie que tous les acteurs du projet apportent leurs connaissances propres, leurs observations et remarques (comme en sciences participatives), mais qu’ils participent également à l’élaboration des questions de recherche, à la genèse de nouvelles connaissances autour de ces questions et à la diffusion des résultats. En d’autres termes, chacun à sa manière participe à l’ensemble du processus de recherche, en tant que collaborateur à part entière.
Plus impliqués que dans une démarche participative, les acteurs du collectif accèdent ainsi à des niveaux de connaissances et de savoir-faire plus détaillés et partagés !
L'accompagnement par un tiers-veilleur
Sélectionné en 2018 et en 2019 sur l’appel à projet CO3 (coodronné par l’ADEME, et co-financé par la Fondation de France), ODySéYeu participe à une expérimentation: l’accompagnement des projets de recherche participative par un tiers-veilleur.
Depuis 2018, nous sommes donc accompagnés par un tiers-veilleur, et notre expérience conjointe dans cet accompagnement est « scruté à la loupe » par l’association Sciences Citoyenne qui analyse les points faibles et les points forts de la démarche.
Qui est le tiers-veilleur et quel est son rôle?
Le dispositif « tiers-veilleur » vise deux objectifs spécifiques pour la recherche participative/collaborative.
Sa raison d’être première est de favoriser une réelle co-construction des savoirs, car si la construction de savoirs fait partie de la mission première des chercheurs, ce n’est pas, a priori, la mission originelle de tous les acteurs d’un projet collaboratif. Il faut donc que chacun apprenne au fur et à mesure. De plus, mener une démarche de co-construction de connaissances aux côtés d’acteurs pluriels ne s’improvise pas, même lorsque l’on est déjà chercheur !
Le tiers-veilleur est donc « l’huile dans les rouages » de la collaboration, un « expert » de la recherche participative et un regard tiers qui peut apporter de la réflexivité au collectif.
Le deuxième objectif est de participer à l’institutionnalisation de la recherche participative. Pour cela, le tiers-veilleur permet de mieux capitaliser sur les expériences diverses de recherche participative en créant du lien entre les communautés de projets et de tiers-veilleurs.
Ainsi, chaque année, des rencontres croisées ou spécifiques entre porteurs de projets accompagnés et tiers-veilleurs sont organisées par l’association Sciences Citoyennes, chargée de l’animation du dispositif. Plusieurs documents de synthèse et d’accompagnement ont déjà été produits sur la base de nos expériences partagées.
Accéder au site de Sciences Citoyennes et à sa page consacrée au tiers-veilleur.